Photo: Julie Boulé
Attention - Ce texte a été écrit au début des années 90 lors d’un atelier d’écriture dont le thème était, je crois, les contes et légendes. Comme pratiquement tous les autres, il n’a pas été retouché : il a été tapé tel qu’il a été écrit, avec ses défauts, qui me semblent assez nombreux dans celui-là.
Il y aurait en effet pas mal de tournures à refaire, le mystère gagnerait à être épaissi, l’atmosphère n’est pas assez développée, la chute de la fin aurait besoin d’être plus élaborée… Mais en séance d'écriture d'environ 45 minutes, on n’a pas grand temps pour ça. Néanmoins, le fond de l’histoire est intéressant.
Le caveau
Un déclic « compliqué » et lourd se fit entendre.
Puis, le bois craqua et les pentures grincèrent. La porte ouverte, on pouvait voir tout un réseau de toiles d’araignées qui s’enfonçait dans la pénombre poussiéreuse du caveau.
25 ou 30 ans, on ne sait pas trop combien d’années se sont écoulées depuis que cette porte a été barrée par l’ancien maire du village.
Il s’agit d’un simple caveau à glace, avec son petit toit qui sort du sol et sa porte bloquée par les herbes et la terre qui se sont accumulées depuis toutes ces années.
Avec l’avènement des réfrigérateurs et des congélateurs, on transforma ce caveau en petit entrepôt pour la voirie du village. Mais il fut rapidement condamné par le maire de l’époque à cause des malheurs qui sont arrivés à tous ceux qui y avaient pénétré depuis son changement de vocation. Tous ces gens ont disparu de façon mystérieuse : noyades, incendies, éboulements et jamais on ne retrouva leurs corps.
Bien des rumeurs avaient couru à ce sujet : en effet, Lord Johnson avait fait construire ce caveau avec de l’argent qu’il n’avait pas à ce moment, mais il finit par se mettre riche avec son fameux commerce de glace, et fit construire des caveaux semblables dans les villages avoisinants. Plusieurs disent qu’il avait pactisé avec le diable pour faire construire son premier caveau, le pilier de sa fortune, mais que ce dernier ne devait servir qu’à l’entreposage de la glace, sinon il fallait le détruire.
Lord Johnson ne fut jamais consulté pour le changement de fonction de son caveau, car il mourut le jour où les premiers réfrigérateurs apparurent au village. Certains croient que cela faisait partie du pacte.
Quoiqu’il en soit de toutes ces vieilles histoires, aujourd’hui on ouvre le caveau pour vérifier, avant de le détruire, s’il n’y aurait pas des choses précieuses à l’intérieur.
Venant de la pénombre, on sent une fraîcheur inattendue. Sur les toiles d’araignée, ce n’est pas de la poussière, mais du frimas.
La faible lumière arrivant de l’extérieur se reflète sur une vitrine sale faisant toute la largeur de la pièce, s’accrochant au passage aux murs, laissant deviner une texture glaiseuse.
On allume les torches électriques. À notre surprise, il ne s’agit pas de reliques de la voirie ou de la mairie, et ce n’est pas une vitrine non plus, mais un mur de glace. Lisse et s’avançant jusqu’au milieu du caveau.
En s’approchant, on distingue des formes dans la glace. C’est avec horreur que nous découvrons les corps de toutes les personnes disparues après être entrées dans le caveau avant sa condamnation.
La glace. Le diable s’installe parfois en des endroits où on le soupçonnerait le moins…